Comment tu vois la vie – Ophélie – Sarrebourg, France

Le portrait d’une voyageuse : Ophélie. Comment tu vois la vie ? C’est un peu la question que nous lui avons posée. Ses réponses…

Comment tu vois la vie - Ophélie - Schiltigheim, France - J'ai Une Ouverture - Tour du Monde

Votre prénom ?
Ophélie

Votre âge ?
29, bientôt 30.

Où vivez-vous ?
A Schiltigheim, en Alsace (sur un ton railleur). Pourquoi je le dis comme ça ? Parce que Yannick a dit qu’on habitait à Strasbourg, mais on n’habite pas à Strasbourg. On habite à Schiltigheim, dans la communauté urbaine de Strasbourg. (Elle sourit).

A partir de quelle distance quelque chose est loin ?
Une distance assez courte parce que je suis très flemmarde. Ce serait 50 kilomètres, c’est-à-dire la distance qu’il faut à peu près pour aller chez mes parents. Parce que je trouve que chez eux, c’est le bout du monde. C’est le bout du monde. Franchement, c’est trop loin. Traverser les champs… Aller chez mes parents, c’est une expé.
50 kilomètres en France, oui, à peu près. Ça commence à faire loin au-delà de 50. Tu te dis que ce n’est pas un trajet que tu vas faire tous les jours. J’ai une de mes amies qui va déménager bientôt, à 30 ou 40 kilomètres, et pour moi c’est loin. Je me dis « voilà, t’iras pas la voir tous les jours » et ça rend les choses moins spontanées.

Avec qui vivez-vous ?
Avec Monsieur Yannick Langlois. Mon conjoint.

Quel est votre métier ?
Je suis professeur d’histoire géographie au collège.

Combien d’heures travaillez-vous par jour ?
Entre 8 et 10. A peu près. En moyenne, 50 à 60 heures par semaine.

Que préférez-vous manger ?
Les pâtes. Parce que c’est facile, ça va vite, et tu peux les manger avec n’importe quoi, et ça sera toujours bon. C’est un repère. Ça te rappelle ton enfance. Tu vois, les pâtes coquillettes au beurre avec la tranche de jambon. Ça te rappelle quand tu es petit. Ça rassure. C’est un truc de chez toi. Quand je rentre de voyage, je me fais un plat de pâtes. Ce n’est pas raffiné ? Attends, des linguinis aux fruits de mer….

Combien de temps mettez-vous pour aller travailler ?
Là, je mettais 10 minutes en voiture cette année. Là, ça sera 10 minutes en vélo

Que représente pour vous la mort ?
La fin de ta vie. Ça représente le moment où tout s’arrête. C’est un passage obligatoire. Un passage ? T’es obligé d’y passer. Si ça m’inquiète ? Ça m’inquiète de me dire que ça peut arriver n’importe quand : en traversant la route, en sortant de chez toi, en prenant ta voiture, en tombant malade. Mais ça ne m’inquiète pas plus que ça. Je n’y pense pas. Ça n’est pas un truc qui me fait flipper. Après, ça va m’inquiéter quand il va arriver quelque chose à quelqu’un que je connais. Par exemple, le cancer et ma mère. Là, ça m’inquiète. Mon père qui atterrit aux urgences pour je ne sais pas quoi, ça va m’inquiéter. Je vais y penser, ça va me triturer pendant une dizaine de jours. Mais ça n’est pas un truc auquel je pense régulièrement.

Qui est Dieu ?
Mon mec. (Elle sourit). Non, il est plein de gens. Il est Bouddha, Allah, Yahvé. Il a plusieurs formes. Je respecte toutes les formes qu’il a pour tout le monde. Mais pour moi…Je ne sais pas s’il est là ou pas. Si ma formation en histoire m’a incité à penser à toutes ces formes ? Non, c’est plutôt les voyages, et la spiritualité qui se dégage de certains lieux, et voir les gens qui croient. Les discussions que j’ai pu avoir avec plusieurs personnes. Les miracles ? Je n’y crois pas trop. Je suis assez sceptique là-dessus.

Quelle est la personne qui vous inspire le plus ?
(Elle réfléchit longuement). La personne qui m’inspire le plus ? Je ne sais pas. Peut-être les intellectuels. Les gens qui passent leur vie à chercher, chercher, chercher…Qui passent leur vie dans les livres et qui essaient de découvrir des choses. Alors pas forcément dans les livres. Mais les gens qui essaient de découvrir des choses, et qui ne se lassent jamais du savoir qu’ils ont. Les gens qui cherchent toujours à savoir plus et qui essaient de faire changer les choses. Ça, ça m’inspire.

Quelle est la chose la plus importante dans votre vie ?
(Elle réfléchit longuement). Prodiguer du bonheur aux gens. Pouvoir aider les gens, pouvoir faire qu’ils se sentent bien. Pouvoir être là pour eux quand ils ont besoin de moi. Ça c’est très important pour moi. Quand je sens que je n’ai pas été là pour quelqu’un, que j’ai loupé quelque chose, ça me rend vraiment triste. Procurer du bien autour de moi, c’est quelque chose de très important pour moi.

A quel âge est-on vieux ?
J’ai l’impression que j’ai passé 30 ans et que c’est un cap. Après à 30 ans, on n’est pas vieux. Je pense que tu es vieux quand tu n’arrives plus à comprendre les gens plus jeunes que toi. Que t’as des raisonnements de vieux con. J’espère que je ne serais jamais vieille, que je garderai toujours mon esprit d’enfant. Après il y a la vieillesse physique, qui arrive plus ou moins tôt en fonction de comment tu as mené ta vie. Je pense que le cap pour la vieillesse physique, il est à la cinquantaine. Il y a des gens qui sont vieux à 20 ans, qui sont fermés, qui ne comprennent rien, qui sont obtus. C’est ça être vieux pour moi. C’est le manque d’ouverture. Donc dans 20 ans, on est vieux ? Beh oui, malheureusement.

Quel est votre meilleur souvenir en famille ?
Je vais t’en donner deux. Le premier, c’est quand j’étais petite. A Noel, on rentrait de chez mes grands-parents le 24 au soir. Je vois un énorme paquet sous le sapin. Mais je n’avais pas le droit de l’ouvrir. Il fallait que je ne l’ouvre que le lendemain matin. Alors, du coup, toute la nuit, t’es là…Vers 6 heures du matin, j’ai sorti mes parents du lit. J’ai déballé cet énorme cadeau qui était plus grand que moi, et c’était une cuisinière. Je pouvais faire ma petite cuisine. Ça c’est vraiment le super souvenir. J’avais 6 ou 7 ans. C’est vraiment un bon souvenir, parce que je n’avais pas beaucoup de choses quand j’étais petite, et ce gros paquet tout énorme, aussi grand que moi, ça m’avait fait vraiment quelque chose.
Et mon deuxième meilleur souvenir, c’est le jour où j’ai eu le concours. Je l’ai appris, j’étais en pleine ville. J’ai consulté les résultats sur mon smartphone, et j’ai pleuré comme une madeleine. J’ai appelé mes parents. J’ai fait « ca y est Maman, j’ai mon CAPES », et là, j’ai entendu ma mère qui pleurait au téléphone. (émue). Elle m’a passé mon père, je lui ai dit « J’ai le CAPES ». Il a pleuré au téléphone. Et entendre mes parents pleurer au téléphone, c’était vraiment un moment super fort. Ils m’ont dit après qu’ils étaient restés allongés sur leur lit pendant 20 minutes à pleurer tous les deux. Rien que d’imaginer ça, ça m’a vraiment… Oui, j’ai trouvé que c’était un beau moment.
Pour l’anecdote, Yannick était en Australie. Il était 15 heures en France, 22 heures en Australie. Je l’ai appelé. Du coup, je lui ai dit « ca y est, chéri, j’ai le concours ». Et il était à l’autre bout du monde. On n’a pas pu le fêter ensemble, c’était assez triste.
Du coup, j’ai eu le meilleur moment de ma vie avec mes parents. Mais en même temps, je n’ai pas pu le partager avec lui. Je l’ai partagé par téléphone. Mais ça n’était pas pareil.

Comment avez-vous rencontré votre conjoint/conjointe ?
Au travail. J’étais surveillante. Et il était prof d’EPS. J’ai descendu l’escalier. Je suis arrivée sous le préau pour prendre le billet. Il m’a regardé, et il m’a dit comme ça « Tu illumines tout aujourd’hui ! ». (Elle rit). Cinq minutes après, il m’agrippe dans le couloir « Est-ce que tu veux aller boire un verre avec moi ce soir ? ». Je lui ai dit non. Voilà. Finalement, on est allé boire un verre dans la semaine. J’étais dans une relation qui s’est finie trois ou quatre jours après. Et depuis ce premier verre, on ne s’est plus quitté.

Votre genre de musique préféré ?
Ah, c’est l’électro. Il n’y a rien à dire. Pour des musiciens, je peux comprendre qu’on dise que c’est de la musique de m****. Mais moi, c’est ce qui me fait le plus délirer. Tu peux partir en vrille dans tous les sens. C’est les meilleures sensations musicales. Quand je suis dans ma voiture en train de chanter, de danser, je peux faire la folle. Après, il y a beaucoup de styles que j’écoute, je suis éclectique. Mais ce que je préfère c’est l’électro.

Croyez-vous en la politique ?
Je suis obligée d’y croire parce que je suis professeur d’histoire-géo. Parce que j’ai envie de claquer les gens qui me disent qu’ils ne vont pas aller voter. Parce que j’enseigne tous les jours à mes élèves comment on a conquis le droit de vote, comment on a fait pour se battre pour ne plus être dominé par des rois, des castes dirigeantes et… Et, je ne peux qu’y croire.
Je voudrais que ça serve à quelque chose. Mais malheureusement j’ai l’impression que ça ne sert pas à grand-chose, que ça n’avance pas. Tu votes pour quelqu’un, mais finalement ça ne correspond jamais vraiment à ce que tu voulais. Je ne crois pas aux promesses des politiques. Je crois que la politique, c’est une très belle chose mais que les hommes politiques ne sont pas tous forcément des bonnes personnes.

Comment vivez-vous l’immigration dans votre pays ?
Je pense que c’est une grande richesse. Mais je suis navrée de voir le rejet que ça peut amener. Ça me désole de voir que même moi, parfois, j’ai des réactions épidermiques. Des remarques limites racistes, on peut le dire.
Mais quand je fais mes courses à Carrefour, que tu croises une Malienne en boubou, puis 5 minutes après des Chinois, puis des Antillais, je trouve ça génial. On a tellement de choses à apprendre les uns des autres. Mais malheureusement, ça n’est pas quelque chose qui est bien géré dans notre pays, je pense.
Il y a cette logique d’entre-soi. Ça te rassure de vivre dans sa communauté. L’entre soi, on l’a créé…Avec les ghettos…Parce que les Français ont quitté les quartiers défavorisés. Et finalement ces gens se sont retrouvés entre eux. Mais pourquoi ? (avec fermeté). On critique le communautarisme mais c’est nous qui les avons laissés entre eux. Nous les avons fuis. Et nous n’essayons pas de les comprendre.
Tant qu’une grande partie des Français ne sera pas plus ouverte sur l’extérieur, on ne pourra pas se comprendre. Le Français moyen est facilement impressionnable, il croit ce qu’on lui dit à la télévision.
Quand tu vois dans le village de mes parents qu’il y a une majorité FN, alors qu’il n’y a pas un noir dans le village…Si le noir, c’est le prêtre ! (Elle rit). Mais pourquoi une majorité FN ? Ils ont peur que ça arrive. Mais ils sont tellement loin, tellement préservés. C’est plutôt ces gens-là qui ne sortent pas de chez eux, qui sont dans leur campagne plan plan qui sont une menace, pour nous et notre ouverture. Ils oublient tous que sans l’immigration, on n’existe pas, on n’a aucune puissance. On dit souvent « la France est une grande puissance », mais sans tous ces gens qui arrivent du monde entier, il n’y aurait pas de puissance française.

Quelle est la meilleure invention selon vous ?
Je dis souvent que la meilleure invention, c’est les toilettes. (Elle rit). Parce qu’il n’y a rien de mieux que d’être posé dessus ! Je me rappelle au Mali. On avait un trou d’où les blattes remontaient…
Plus sérieusement, une excellente invention, c’est Internet. Ça nous permet d’avoir accès à une quantité d’informations en un temps record. Ca connecte le monde entier. C’est une bonne invention et en même temps, c’est bien qu’il y ait certaines zones qui soient exclues de ce phénomène. C’est peut-être très égoïste de dire ça puisque nous nous avons accès Internet tout le temps, à tout moment. Mais c’est vrai que se retrouver isolé dans un village où tu n’auras pas ton smartphone, ta tablette, où tu ne pourras rien faire… Tu seras obligé de compter les mouches, de lire un bouquin pour passer le temps. (Elle sourit).

Qu’est-ce que l’amour ?
Je vais parler par rapport à Yannick, parce que c’est l’amour de ma vie ! Quand on s’est séparé, la façon dont il me regardait quand on se revoyait… Car on se revoyait quand même… Je me sentais belle et désirée dans ses yeux. Je me disais, ça n’est pas possible, il n’y a que lui qui me regarde comme ça. Et par ailleurs, les 6 mois où nous avons été séparés, je n’ai pas dormi. J’ai fait 6 mois d’insomnies. Parce que quand il est là, il me rassure. Il me réconforte. Quand il me prend dans ses bras, ça va tout de suite mieux. Il me protège. Quoi qu’il arrive, il sera là.

Quel est votre plus grand rêve ?
C’est continuer à découvrir le monde. Je n’ai pas été élevée dans cette culture du voyage. Mais j’ai toujours voulu découvrir le monde. La première fois que je suis partie en voyage, c’était magnifique. Magnifique de me dire « j’ai pris un avion, je suis à l’autre bout du monde, je suis en train de voir des trucs de malade ». Mon plus grand souhait est de continuer. On n’aura pas assez de toute une vie pour voir toutes les merveilles dont le monde recèle. Mais mon plus grand rêve est d’en voir le plus possible.

Si vous aviez un principe de vie ?
Il faut vivre maintenant. Il ne faut pas regarder derrière, il ne faut pas trop anticiper. Vivre ce que t’as à vivre maintenant. Prendre ce que la vie t’offre sur le moment. Et pas trop se poser de questions. Utopiste ? Peut-être. Mais dans une vie tu passes des moments qui te font vraiment ch***. J’en ai quand même souvent ch** dans ma vie. Donc il faut se satisfaire de petites joies simples. Si tu ne sais pas faire ça, tu es vite blasé, je pense.
Il faut vivre chaque instant comme il le mérite.

Entretien le 18 Juillet 2014 dans un café à Antsirabe, à Madagascar

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