Daouly d’Ifaty. Un sacré gars. Un gars drôle et intéressant. On lui a posé notre questionnaire « Comment tu vois la vie ? ». Ses réponses …
Votre prénom ?
Daouly
Votre âge ?
49 ans
Où vivez-vous ?
A Mangily, à Madagascar. Mais je suis né à Salary.
A partir de quelle distance quelque chose est loin ?
100 kilomètres ou plus surtout quand il n’y a pas de vent, parce que tu vas moins vite.
Avec qui vivez-vous ?
Avec ma femme, mes enfants, ma famille.
Quel est votre métier ?
Je suis piroguier-guide.
Combien d’heures travaillez-vous par jour ?
Je ne travaille pas par jour. Parfois, c’est deux heures pour les touristes que j’accompagne faire de l’apnée. Parfois, c’est des jours entiers.
Que préférez-vous manger ?
Le poisson grillé, du thon. Un rougaille tomate, et un peu de riz. Tu jettes un peu de piment sur la rougaille… Oh…(Il soupire de plaisir).
Combien de temps mettez-vous pour aller travailler ?
Cela dépend des fois. Parfois, je vais speeder. Parfois, je prends du temps, je parle avec les amis sur le chemin. Cela va donc d’une fraction de seconde à des heures.
Que représente pour vous la mort ?
La mort ? La mort, c’est la mort. La vie, c’est la vie. Quand t’es mort, t’es mort. Non, ca ne me fait pas peur du tout.
Qui est Dieu ?
(Il rit). Oh con… Dieu, c’est mon père et ma mère. C’est mon Dieu. C’est grâce à eux que je vois ce soleil. C’est eux mon Dieu… Non, je n’ai pas d’autre Dieu. Si c’est Jésus ? Boh oueh, on peut dire ça. Oui, je dis que je suis protestant, parce que ma mère, c’est la religion qu’elle a suivie. Puis moi aussi, j’ai suivi pendant quelques moments. Mais bon, c’est la tradition.
Quelle est la personne qui vous inspire le plus ?
La personne qui m’inspire le plus ? C’est ma famille. Parce que ma famille… ON est toujours ensemble. C’est la famille. Si ça m’inspire ? Bien sûr ! La famille, ça veut dire ma femme, mes enfants, mon père, ma mère. (On lui dit qu’il aurait pu nous dire autre chose, quelqu’un d’autre). Eh non, arrête, ça c’est mon idée. (On rit). Tu crois que ce que je te dis, c’est bidon ? (Il rit).
Quelle est la chose la plus importante dans votre vie ?
C’est qu’on vive bien, avec ma famille. Vivre bien, ca ne veut pas dire forcément être riche. Mais ca veut dire améliorer ma vie : envoyer mes enfants à l’école, tu vois, les nourrir. Qu’on vive bien ! Que tout le monde soit en bonne santé ! Ca, c’est important.
A quel âge est-on vieux ?
A partir de la moitié de siècle. (On lui demande donc s’il est vieux). Beh oui. (Il rit).
Quel est votre meilleur souvenir en famille ?
Je me rappelle de nous au premier de l’an. Tout le monde, toute la famille va dans le village natal. A Salary. C’était… En 1972. En 73, 74. Tout le monde vient, tout le monde apporte à boire, à manger. Deux chèvres ou deux moutons, tu vois. La musique à fond…La vie quoi. On passait une semaine ensemble. On se connaît tous. Maintenant, ca n’est plus comme ça. Maintenant il faut travailler. Chacun reste dans son truc. Pas le temps ! Et puis aussi, parfois t’as pas la tune. Transport et tout…
Comment avez-vous rencontré votre conjoint/conjointe ?
J’ai rencontré ma femme quand je travaillais avec un bateau semi-rigide. On faisait le trsnafert aller-retour de Mangily – Tulear – Anakao dans la journée. C’est là que je l’ai rencontrée. Avant, je connaissais sa sœur, sa grande sœur. C’est à force de connaître sa sœur, que j’ai chopé la petite. (Il rigole). J’arrivais dans le village d’Anakao, j’y dormais. Parfois, j’y restais deux, trois jours. Or ma femme est d’Anakao…
Votre genre de musique préféré ?
On peut choisir combien ? Le tsapiky, le reggae et le slow. Le tsapik, c’est un rythme typique malgache, qui vient du Sud. Le reggae…j’aime le style du début du reggae. Le ska ! J’aime un genre de style ska, reggae. Un vieux reggae. Le slow, tu sais, c’est le slow. (Il rit). C’est une musique de rêve, ça le slow. Parfois, tu rêves, tu te dis « ah si elle était à côté de moi ». Loin des yeux, loin du cœur, tu sais.
Croyez-vous en la politique ?
Ce truc de merde ? Là, il y en a trop. Non, j’en ai assez. Je parle pas de ça. (Il rit).
Comment vivez-vous l’immigration dans votre pays ?
Parfois, c’est bon, si j’amène des bonnes choses. Parfois, c’est pas bon. L’immigration des blancs ? Pour l’instant, c’est pas bon. Parce qu’il y en qui immigrent, et qui font n’importe quoi. Qui font le pire (le tourisme sexuel).
Les waazahs qui créent des hôtels ? Oui, ca c’est bon, parce que ça aide l’économie locale.
Quelle est la meilleure invention selon vous ?
Les études. L’éducation.
Qu’est-ce que l’amour ?
L’amour ? L’amour aussi, ca présente pas mal d’inspiration. Si ça rend heureux ? Oui, on peut dire ça, mais parfois ça rend malheureux aussi. Ca rend heureux quand on reste bien, quand tout va bien. Mais dès qu’il y a une chose qu’on ne s’attend pas, qu’on ne supporte pas, ça rend malheureux. Parce qu’avant, c’est ton cœur, et après ça n’est plus ton cœur. L’amour le plus fort pour moi ? Il y en a deux ou trois. L’amour pour la femme, l’amour pour la vie, l’amour pour mes enfants, tu vois.
Quel est votre plus grand rêve ?
Le rêve pour moi ? Je rêve d’être bien, dans ma vie ! Si je suis déjà bien ? Non, pas encore. Moi, je vis au jour le jour. Là, je fais ce voyage avec vous. Mais quand est ce que je vais en faire un autre ? T’imagines ? Parfois, ça dépend… Je rêve de la même vie, mais où je sais ce que sera le lendemain. Pas la plus belle vie du monde, mais la plus belle vie du quartier, de la famille. Que j’ai ce qu’il faut. Parce que si t’as pas ça, tu vas pas loin.
Si vous aviez un principe de vie ?
J’ai pas de devise. Si… « Ca dépend ». C’est ça ma devise : ça dépend.
Entretien sur une pirogue entre Ifaty & Morombe le 9 juillet 2014
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