Voyage au Sud de l’Afrique – Notre vidéo

Pendant 2 mois, nous avons roulé au Sud de l’Afrique. Namibie, Swaziland, Botswana et Afrique du Sud. La rencontre humaine a été délicate, mais  la rencontre avec la nature a été magnifique. Nous en avons fait un petit film.

Rhino - Jaiuneouverture

Mon envie de réaliser une vidéo de notre voyage en Afrique du Sud s’est fait attendre. Longtemps. Il faut dire que ce pays m’a laissé un sentiment ambigu, comme aucun autre

Nous sommes partis de Johannesburg vers les parcs du Nord, puis nous avons longé la côte indienne, puis atlantique pour rejoindre et visiter la Namibie. Nous avons achevé la boucle en traversant le Bostwana. Un très long périple, de 13 000 kilomètres.

Des pays blessés

Derrière les clôtures électriques et les systèmes d’alarmes, sur les reliques de l’apartheid et l’ostracisme ambiant, nous n’avions jamais aussi peu rencontré de gens dans un pays. « Ne prenez pas ce chemin, il y a un an, un touriste s’est fait tuer ». « N’allez pas dans ce quartier, c’est trop dangereux.». « Ne sortez pas la nuit ».

La colonisation et l’apartheid ont laissé à ce pays des schémas sociaux, économiques et politiques qui pèsent encore aujourd’hui de tout leur poids, et de leur inadaptation. Et même en voyage, même étrangers, cela nous a sautés aux yeux.

Quelques semaines auparavant, nous étions à Madagascar dont l’organisation des villages par exemple est le fruit et le socle de leur culture. En Afrique du Sud, ou en Namibie, nous avons découvert des Africains se contorsionner avec leur culture et leur vie sociale dans des bâtiments bétonnés le long de grandes routes. Le lieu ne convient plus à cette culture, car il a été réaménagé par la culture coloniale occidentale. Un symbole : j’ai vu en plein milieu d’autoroutes à 4 voies, des gens faire du stop ou même traverser la voie. Au final, ces villes sont des lieux paradoxaux de richesses pour les entreprises mondialisés, mais des trous de pauvreté sociales sans fond.

Ce pays possède aussi 11 langues officielles. Si Nelson Mandela, apprécié par tous, a fait avancer la « Rainbow Nation », aujourd’hui les mélanges et l’unité sont très loin d’être avérés. Les Blancs se sont toujours présentés à nous en citant leurs origines. « Je suis blanc, mais afrikaaner ». « Je suis blanc, mais attention, je suis d’origine anglaise ». Perdus dans le Namaqualand, une région vide, les Sud-Africains blancs d’un petit hôtel familial n’ont pas cherché à nous intégrer avec leurs clients Afrikaans. Ils n’ont pas parlé anglais, ils se sont limités à s’exprimer en afrikaans. A Swapkopmund, ancienne colonie allemande en Namibie, un commerçant nous a reprochés de ne pas dire bonjour en allemand.  En Afrique du Sud, un peu moins en Namibie, nous avons entendu les peurs et les rancoeurs des communautés envers les autres.

Ce pays est aussi un pays de safaris. Le touriste y vient en 4×4, visite un parc, dort à l’hôtel sécurisé, ou dans le camping du parc. Il reprend sa voiture et part pour un autre parc. On n’est donc pas dans un pays africain comme Madagascar où les choses se passent en vis à vis, dans le contact physique. Ici, on se protège des animaux dans une voiture, et finalement on s’éloigne des gens parce qu’on reste dans la bulle de son transport privé.

Tout ce que je dis n’est en rien une certitude ou une vérité. Simplement une expérience. J’aurais aimé plus de contact, plus de rencontres. Mais l’Afrique du Sud est un pays qui se reconstruit, qui tente de sortir de ses fractures, de son insécurité et de sa pauvreté. C’est un pays hybride, à la fois développé et à la fois pauvre. Les inégalités sont grandes, et du coup la distance entre les gens est peut être plus grande aussi.

Pour nous, seuls Keith et Dee ont créé une brèche dans cet espace un peu fermé. Ils nous ont ouvert leurs portes, et un contact chaleureux a été établi. Ils ont répondu à nos questions, et malgré leur immense ouverture, on sent poindre toutes les difficultés d’un pays qui repose sur un passé complexe, et dont toutes les membrures du pouvoir sont pourries par la corruption.

Cette vidéo en est le symbole, je crois, car on ne voit pas d’humain. J’ai rajouté à la fin quelques photos comme pour me remémorer que nous avons pu partager et vivre des choses avec d’autres. Mais ces moments furent rares, et ça me donne quelques regrets. J’ai essayé de lancer des discussions, j’ai posé des questions à une serveuse, à un homme dans la rue, à des gérants d’hôtels. Mais les gens n’osent pas répondre de peur de mettre de l’huile sur le feu.

Le berceau de la nature

Alors ce film, c’est dans ses images et ses absences, ce que nous n’avons vécu et pas vécu. Et pour ce qui a existé, ce voyage a été une rencontre magnifique avec la nature et les animaux.

J’ai porté un lion dans mes bras. Nous avons pu nous approcher à quelques mètres d’une baleine curieuse et joueuse. Nous avons assisté à la garde des lionnes protégeant leur conquête des vautours. Nez à nez avec un rhinocéros, apercevant au loin les formes allongées de girafes, au milieu de la steppe africaine, j’ai ressenti des émotions enfantines, heureuses, fortes. J’ai eu le sentiment de n’être rien, mais à l’origine du monde, au milieu d’espèces qui sont les vieux et légitimes habitants de notre planète.

J’ai marché dans le plus vieux désert du monde pour arpenter des dunes oranges et découvrir des oryx. Nous avons contemplé les vols de flamands roses à Walvis Bay où les poteaux électriques s’enfoncent en ville dans des dunes jaunes. Les montagnes et les vertes plantations de canne à sucre du Swaziland, les constructions volcaniques oranges de Spitzkoppe en Namibie, la baie de Knysna en Afrique du Sudsont autant d’exemples d’une région splendide.

Ce film essaye d’en être un peu le résumé.

Matt

 

Evetmatt Jaiuneouverture

Bienvenue sur ce site pétri de nos mains avec un peu de levain, de connexion cyclothymique, et d'amour. Enfants du pays du canard, mariés et Parisiens pendant 7 ans, nous avons quitté femmes et enfants il y a un an pour faire tel Spoutnik le tour de la terre. On n'est pas encore sur orbite, mais on est contents quand même. Et on vous le partage ici ! Eve et Matthieu

13 commentaires :

  1. Magnifique vidéo et très bel article ! Je trouve l’analyse que vous faites très intéressante et je pense qu’il est difficile de s’en rendre compte tant que l’on a pas vécu cette expérience. Je ne connais pas l’Afrique du Sud, et c’est un pays qui m’a toujours attiré pour sa nature sauvage. Mais je suis loin d’imaginé la complexité culturelle qui y règne. Pourtant j’ai l’impression de lire mon expérience au Gabon et au Congo, avec l’avantage que ce sont des pays avec moins d’insécurité.

    • Bonjour Jonathan. Merci pour ton commentaire. C’est vrai qu’il est difficile de faire passer notre sentiment, qui reste une impression personnelle. Je ne veux pas faire de généralité mais c’est vrai que nous avons ressenti une vraie pression tout au long de ce voyage, confirmée par les discussions et les lectures que nous avons eues. Pauvreté, corruption à tous les étages, dans la police, la justice, la politique créent une atmosphère de méfiance que je peux comprendre… J’ai vraiment très envie d’aller en Afrique de l’Ouest pour connaître les pays dont tu parles. As tu un site où tu livres tes récits ?

      • Bonjour Eve et Matt,
        Je n’ai pas encore eu le temps de rédiger un article sur le Gabon, ça ne serait tarder. J’ai tant de choses à dire après 5 mois de vie sur les routes, mais je ne sais pas si j’aurais les mots juste pour décrire mon expérience.

  2. ça le fait vraiment.
    Vraiment, vraiment, vraiment.
    Curieux comme cette expérience (c’en est une) est encore très présente chez moi. Vous aussi à ce que je vois. Les voyages difficiles me laissent une plus forte empreinte. J’avais presque oublié, paradoxalement, comme les paysages sont grandioses. Et les animaux! J’ai beaucoup rêvé sur les routes, aux chemins non goudronnés. Il y en avait plein et nous ne les avons pas pris. Au bout du bout de la poussière, j’imagine un autre pays avec d’autres gens bien isolés. J’aurais aimé avoir le courage d’aller, à leur rencontre. André et sa furtive épouse, en était un. Bien surprenant. Il nous a bien recommandé de ne pas quitter les grands axes, et ce au début du voyage…

    • Il faut y revenir…Nous avons aussi envie de revenir au Vietnam, à Madagascar, en Nouvelle-Zélande… Pour le vivre, j’ai la sensation que le premier voyage dans un pays est toujours une expérience inachevée…Comme si la découverte rend plus spectateur, quand revenir permettrait d’être un peu plus acteur de son expérience. En Nouvelle Zélande, par exemple, j’ai le sentiment d’avoir vu de magnifiques choses. Mais j’ai déja besoin de revenir pour en profiter mieux…
      En Afrique du Sud, un guide (une personne) aurait été peut être la solution pour sortir des sentiers battus…

  3. Votre description est assez juste.
    Je suis allée en Afrique du sud il y a de cela 8 ans, c’était dans un contexte bien précis avec l’école d’archi, nous avions des sud africains qui travaillaient avec nous. C’était dans le Kwazulu natal et avons eu la chance de faire de belles rencontres avec les locaux, surtout avec les enfants et ados des collèges dans lesquels on intervenait. Je me souviens de longs échanges où ils parlaient librement et sans complexe des questions de société, du sida, de leur rapport à la famille, à l’amour…ils étaient même ravis de pouvoir s’exprimer.
    Je pense que sans ce contexte de « travail », je n’aurais certainement pas eu accès à tout cela.
    Votre ressenti me fait penser à celui que j’ai pu avoir au Burkina il y a deux ans…parfois les choses ne se font pas. Avec le temps, on digère et l’envie d’y retourner pour ouvrir quelques portes revient.
    Il y a certains pays qui s’offrent moins facilement que d’autres…
    Cela dit, la nature peut être un beau compagnon et votre vidéo en est l’illustration parfaite.

    Bonne suite de voyage!

    • Bonjour Céline,
      Je suis d’accord avec toi, oui. Nous avons rencontré un Américain notamment, qui dans la cadre d’un bénévolat, vit dans un village où il a été « adopté ». Il y est professeur d’anglais, et aujourd’hui un membre de leur communauté.
      Si le contact est plus compliqué en Afrique du Sud, il est certainement lié à une méfiance au départ. Mais quand la confiance a été gagnée, la relation semble magnifique.
      Avec du recul, oui, revenir est aussi beau que découvrir la première fois. Je pense…
      Céline, avez vous lu le « Comment tu vois la vie » de Keith et Dee ? Comme vous êtes allée en Afrique du Sud, je suis sûr que cela vous intéresserait…
      http://jaiuneouverture.com/afrique/keith-et-dee-vie-de-sud-africains-tour-du-monde/
      A bientôt
      MAtthieu

      • Salut Mathieu,
        Tu peux me tutoyer hein, je ne suis pas beaucoup plus vieille que toi! ça me donne des rides le vouvoiement.

        J’ai lu témoignage de Keith et Dee oui. C’est très intéressant et très touchant. On sent que ces deux « personnages » n’ont pas toujours eu la vie facile mais sont plein d’amour, mais pas que… peut être une petite pointe « d’un je ne sais quoi » difficile à définir, rancoeur? tristesse? mélancolie?
        L’Afrique du sud est un pays compliqué, aussi bien pour le touriste que pour les gens qui y vivent. On ne fait pas table rase d’un tel passé aussi facilement.
        L’impression que j’en avais eu pour avoir eu des contacts aussi bien avec des noirs-africains que des blancs-africains, c’est que même s’il n’y a plus l’appartheid, très peu se mélangent. Ils continuent de vivre côte à côte sans se côtoyer (pour une grande majorité) Pourtant, c’est un pays à la culture riche et métissée qui gagnerait tellement à être plus accessible et à accepter sa multiculturalité.

        C’est amusant, parce qu’en lisant le « comment tu vois la vie » de Keith et Dee, je me suis dit que vous pourriez très bien avoir des réponses similaires en France pour certains domaines (immigration) et d’autres certainement bien différents (religion).
        Pas plus tard qu’il y a deux jours, nous avons mangé à côté d’un groupe de retraités français qui passent 3 mois au Vietnam tous les ans. L’un d’entre eux était d’origine vietnamienne mais a quitté le pays très jeune…tu aurais vu son rapport à l’immigration alors que finalement, il en est lui même issu. Pour ma part, j’ai toujours un peu de mal avec les sociétés au mérite…car je ne pense pas que l’on récolte toujours ce que l’on a semé, en bien ou en mal d’ailleurs. Bref, ceci est un long débat que je vais t’épargner!
        Parfois, quand tu voyages tu aimerais simplement ne pas rencontrer certaines personnes…et parfois tu es triste de ne pas en avoir rencontré assez! La frustration est un bon moteur.

        Enfin, je suis bien d’accord avec toi, je crois que la première fois dans un pays est toujours un peu en surface. Je ne trouve pas cela grave, c’est juste ainsi. Nous ne sommes pas maitre des rencontres ou des sentiments que l’on peut avoir vis à vis d’une culture. L’important, à mon sens, c’est que ça ouvre à l’autre malgré tout… et ça te permet à toi de mieux te connaitre.

        • Céline,

          Merci pour ton commentaire qui est un article en lui-même ! 🙂

          Je t’ai vouvoyé, parce qu’en fait, étant concentré sur la réponse que je te donnais, je n’ai pas compris que le vous que tu utilisais était destiné à Eve et moi… 🙂
          Je suis d’accord avec tout ce que tu dis, et je pense notamment aux réponses aux questions que nous posons aux gens. Oui, c’est vrai, les sentiments des gens sont les mêmes aux 4 coins du monde. Et notamment, vis à vis de l’immigration, ou de la politique. Hormis Khao, un Laotien, tous les autres ne croient pas en la politique.
          Nous avons rencontré également un Vietnamien au Vietnam qui revenait juste des USA où il avait vécu 15 ans. Il était…très xénophobe !

          Je trouve très intéressant ton propos sur la frustration comme moteur. Et en même temps, je suis frustré d’être frustré. 🙂 Je m’explique. Les gens qui voyagent sont tellement considérés dans notre pays notamment comme des gros chanceux que je m’en veux de regretter des choses ou d’en être frustrés. Je ne voudrais être qu’émerveillé, et profiter bouche bée de tout ce que je vois. C’est très naif…et surtout complètement factice, puisque depuis 14 mois que nous voyageons, je me rends bien compte que nous ne voyageons plus…Nous vivons. On ne fait plus du tourisme, on vit notre vie mais ailleurs, en bougeant. Et quand on vit sa vie, on vit toutes sortes de sentiments. MAis c’est plutôt difficile de l’exprimer sur un blog. Car entre l’intérêt de la sincérité et l’impudeur de la sincérité, il y a une frontière très tenue.

          Je suis en train de visiter votre blog. Je suis épaté et enthousiaste. Je trouve les photos magnifiques (qu’est ce que vous utilisez comme appareil ? ). Et je trouve votre angle de vue super sympa. Je trouve que votre blog est beau !
          Je t’avoue que j’ai suffisamment l’impression de passer du temps sur Internet que normalement, je ne regarde pas ce que bloggent les autres voyageurs…Je me dis que tant que je voyage, je suis auteur de blog…Et qu’à notre retour, je serai lecteur. Mais là votre blog m’a vraiment donné l’envie de le lire ! Je vais vous suivre ! 🙂
          Matthieu

          • Promis, pas d’article aujourd’hui, je me laisse trop souvent emporter par les mots!
            Merci pour les compliments pour le blog. On a essayé de faire un petit truc joli pour les amis et la famille, et si c’est apprécié, ça fait bien plaisir. En tout cas, tu passes quand tu veux 🙂
            Enfin, juste un petit mot sur la frustration, je crois qu’elle est nécessaire ou tout du moins inévitable. En voyageant longtemps, on est effectivement dans un quotidien, et tout quotidien a ses hauts et ses bas. Tout n’est pas toujours merveilleux, ce qui laisse aux moments magiques une place à part. Pas de quoi culpabiliser.
            Peut importe finalement le regard des autres, la réussite de la découverte d’un lieu dépend souvent de pas grand chose…et ce « pas grand chose », nous n’en sommes pas maitre.

            Allez, je vous laisse profiter de votre périple sud américain

            A très bientôt

          • Attends Céline, aucun souci si tu écris des articles comme commentaires ! Au contraire !
            Pour passer sur votre blog, pas besoin d’appeler avant ? 😀
            Pour la frustration, tu as raison, et ca fait du bien de le partager, car pour le moment, nous n’avons pas rencontré de voyageur au long cours et donc n’avons jamais pu échanger sur ce point ! Ca rassure donc quand même de savoir que c’est pareil pour vous !
            En espérant continuer à échanger
            A tres bientôt

            Matthieu

  4. (Au fait, notre appareil photo c’est un fujifilm X20 pour répondre à ta question)

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