Ma semaine à l’orphelinat – Eve – Di An – Vietnam

Quand on va vers ce genre d’expérience, on sait que l’on va être chamboulé et surpris mais on ne sait pas encore comment. Je m’en voulais un peu car j’avais l’impression que le fait d’en avoir conscience allait m’empêcher de vivre sincèrement cette semaine.

Eh bien ce fut faux.

Comme l’a décrit Matthieu, à peine le temps d’arriver que les enfants nous sollicitent. Je sortais juste de la voiture quand une petite fille toute cracra et qui sentait le popo me tend les bras. Ok, c’est parti pour le premier câlin.

On nous avait dit, vous verrez, vous ne serez pas accueillis par le personnel de l’orphelinat, il faut trouver vous-même votre place. Ca a été le cas et ça fait réfléchir sur notre rôle. Les enfants nous ont donné tout de suite la place qu’ils voulaient pour nous mais dans les premiers temps je m’obstinais à chercher l’aval des adultes. Puis j’ai laissé tomber.

Ici, le rôle des volontaires est de donner du temps à ne rien faire et de la tendresse. Le staff est trop peu nombreux pour faire cela. C’est donc notre travail et c’est fort.

Rapidement, le fait de voir que nous étions attendus et reconnus par les enfants donne de la confiance, légitime notre présence et notre façon de faire. Une fois ce constat établi, tout va bien.

Très rapidement j’ai été surprise de me rendre compte qu’il est difficile de ne pas avoir de « chouchou ». Comment gérer cela ?

La première petite fille que j’ai rencontrée, la petite mimi cracra, Thuyen a 3 ans et j’ai été plus qu’émue quand le 2ème jour elle m’a reconnue et sollicitée pour un échange de câlins. Voilà, j’avais déjà une chouchou.

En fait, c’est une relation dans les deux sens qui s’établit et elle est le plus souvent à l’initiative de l’enfant. C’est un lien particulier qui se tisse à deux.

Il y a beaucoup d’enfants et pas tout le temps de volontaires (nous étions 5) par conséquent, cette relation particulière s’établit avec un petit nombre d’enfants. Un jour, je suis allée aider la maîtresse des « moyens ». Avec une petite fille, nous avons fait des lignes de « b ». Elle comprend bien plus vite que les autres et quand elle s’applique fait bien mieux. Mais voilà, elle a une capacité de concentration quasi nulle. Nous avons passé un long moment toute les deux et me voilà avec une deuxième « chouchou ».

Une autre petite fille se fait embêter par un grand ; je vais pour la consoler et même si elle ne voulait pas de réconfort au début après elle ne voulait plus me lâcher. Une troisième chouchou !

Au final me voilà avec 6 chouchous mais il y a 100 enfants qui ont besoin d’affection…

Alors, comme je suis une adulte, comme on m’a appris à partager, je ne peux pas rester avec seulement 6 d’entre eux et là, il faut apprendre à gérer le caprice ! Comment être dure avec eux qui veulent seulement un peu d’exclusivité de temps en temps ? Ils n’ont rien à eux et aucun espace de liberté. C’était donc difficile de leur refuser cela mais petit à petit et sans trop d’accrocs le message est passé.

De cette semaine je ne suis pas ressortie indemne. Ca chamboule car la plupart du temps je n’ai rien fait d’autre que des câlins ou des jeux impliquant d’être en contact physique. Ca chamboule de constater comme il est précieux d’avoir de la tendresse et d’en donner. Etre face à ce besoin humain assumé et bien ça touche les tripes et le cœur. Et puis c’est fort de voir toute cette solidarité entre eux et cette joie qui est propre aux enfants malgré tout.

Eve

Du 19 au 26 avril 2014, Di An, Vietnam

Evetmatt Jaiuneouverture

Bienvenue sur ce site pétri de nos mains avec un peu de levain, de connexion cyclothymique, et d'amour. Enfants du pays du canard, mariés et Parisiens pendant 7 ans, nous avons quitté femmes et enfants il y a un an pour faire tel Spoutnik le tour de la terre. On n'est pas encore sur orbite, mais on est contents quand même. Et on vous le partage ici ! Eve et Matthieu

5 commentaires :

  1. Difficile après ça de laisser un commentaire. Bravo pour la lucidité ainsi que la manière. Bravo.
    Ensuite c’est de l’épiderme. On ne peut être que touché par les visages des enfants.
    Mais c’est personnel.
    Il y a une réelle différence d’appréhension entre vous, c’est ce qui en fait la richesse.
    Biz

  2. Ping : Ma semaine à Graines de Bitume – Eve

  3. Fabienne (fabiennedejesus@live.fr)
    j’ai été touché par ce que vous faites. j’ai aménager une chambre dans ma maison pour héberger des bébés abandonnés j’ai assez de place dans la chambre pour 7 berceaux ici en Côte d’Ivoire il ya beaucoup de cas d’abandon d’enfants.. je serais ravie de vous recevoir ici à Abidjan dans ma maison pour que vous veniez voir le travail que nous avons commencé à faire.. mon numéro de tél: +225 01 49 55 12.. bien à vous

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